La médiathèque Maurice-Genevoix fêtait une décennie d’existence sur le quartier d'Orléans-La Source. À l'heure des inégalités sociales, ce lieu d'éducation populaire est une vraie porte d'entrée pour tous les habitants du quartier, proposant une inscription libre et gratuite.
La forme du gâteau sonnait comme une évidence pour ce dixième anniversaire. Quoi de mieux qu'une pâtisserie rendant hommage à l'architecture de la bibliothèque Maurice-Genevoix célébrer l'existence de ce lieu culturel symbolique du quartier d'Orléans-La Source ?
Hommage a été rendu à la forme du bâtiment, dont le design a été pensé pour être le plus agréable possible pour les visiteurs. "L'idée était d'avoir une réflexion environnementale, en privilégiant un éclairage naturel des lieux", détaille Pascale Seurin, l'architecte parisienne qui a conçu cet édifice et qui était présente pour cet anniversaire. "Il était aussi important de mettre de la couleur, afin que l'intérieur reflète une ambiance plus apaisante. Cette idée sortait de l'ordinaire, car en temps normal, mes homologues masculins ne voient pas la vie en couleur. Ils se placent souvent sur des tons gris-blanc. J'ai déjà perdu des concours d'architecte parce que je proposais trop de couleurs."
Mais Orléans lui a fait confiance. Et à en croire les employés de la médiathèque, le pari est parfaitement réussi. "Je pense que c'est l'établissement le plus beau d'Orléans en termes d'intérieur et de lumière. Au-delà du design, c'est aussi un lieu de vie, de rencontre et d’émancipation intellectuelle", insiste Christine Perrichon, directrice du réseau des médiathèques d'Orléans.
La gratuité universelle pour une éducation populaire
Depuis son arrivée à ce poste, il y a trois ans, la responsable a fait le pari avec la Ville de la "gratuité universelle". En d'autres termes, n'importe qui, qu'il soit habitant de La Source ou de l'autre bout de la planète, peut s'inscrire et emprunter gratuitement les documents proposés par tout le réseau des médiathèques d'Orléans, soit plus de 250.000 références empruntables selon la base de données des médiathèques d'Orléans (près de 300.000 consultables). Pour s'inscrire, il suffit de se présenter avec une pièce d'identité et un justificatif de domicile.
"Quand je suis arrivée, il y avait quatorze tarifs différents. Mais depuis qu'on a mis en place cette gratuité, la relation entre le personnel et le public s'est considérablement améliorée. Il n'y a plus cet enjeu économique, c'est devenu quelque chose de complètement libre", assure la directrice, qui explique que le nombre de visites sur l'ensemble des médiathèques orléanaises est passé de 290.000 en 2015 à 460.000 en 2018 : "Cela a provoqué un afflux de population très important. Et le coût pour la municipalité reste raisonnable. On faisait 62.000 euros de recettes. La mairie peut donc l'amortir."
Une section "jeux-vidéo" en préparation
Un choix réfléchi, et finalement logique, à entendre Christine Perrichon, qui acquiesce lorsqu'on lui parle d'éducation populaire : "On est au centre de cela ! C'est proposer à tous les publics tous les outils intellectuels pour se construire. Et dans cette période troublée, je pense que notre rôle est fondamental."
Nouveauté au programme, une section "jeux-vidéo" devrait voir le jour à Maurice-Genevoix entre la fin 2019 et le début 2020, "avec des propositions différentes", selon la directrice du réseau. "On veut élargir l'éventail des possibles en passant notamment par des jeux indépendants. On veut aussi privilégier le "jouer collectivement" plutôt que le jeu individuel."
Le taux d'inscription ne décolle pas vraiment
Néanmoins, certains points restent à travailler pour que cette éducation populaire le devienne totalement Peut-on améliorer la communication ? Peut-on inciter plus de parents à y amener leurs enfants ? Peut-on inciter plus de jeunes à s'y rendre par eux-mêmes ? Toujours est-il que depuis la mise en place de la gratuité universelle, le taux d'inscription des Orléanais dans leurs médiathèques est passé de 16 à 18% en trois ans, selon les chiffres donnés par la directrice du réseau des médiathèques.
Le pourcentage est supérieur à la moyenne nationale (15%). Mais la hausse reste assez faible, surtout quand on la compare avec la statistique des visites, qui ont quasiment doublé sur la même période. Cela pourrait montrer que la fréquentation de ces lieux reste encore l'apanage d'une certaine catégorie de la population, habituée à les visiter, et peut-être incitée à venir plus souvent qu'auparavant.
L'outil culturel est bel est bien présent et en excellente santé. Reste à le faire davantage connaître et à convaincre les habitants du quartier de s'y impliquer. Un travail de longue haleine, mais le jeu semble clairement en valoir la chandelle.
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Thomas Derais
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