top of page
  • Photo du rédacteurThomas Derais

Majoritaires, mais peu consultés : les jeunes d'Orléans-La Source face aux problématiques sociales

Dernière mise à jour : 9 juil. 2020


Soupoune, Eda et Virginie ont donné leur vision de jeunes du quartier de la Source
Soupoune, Eda et Virginie ont participé au Bondy Blog Centre Café. @ Daniel Beghdad

Que reste-t-il du grand débat sur le quartier d'Orléans-La Source ? Dans les inscriptions du cahier de doléances, ou durant la réunion publique organisée le 13 février 2019, aucun jeune au rendez-vous. Alors nous avons tenté d'aller à leur rencontre avec Daniel Beghdad, du Bondy Blog Centre, sur la place Ernest-Renan. Nous avons aussi invité trois jeunes habitants dans les studios de Radio Campus Orléans pour s’exprimer, dans un document audio à retrouver en fin d’article.


Parole demandée, parole désertée. Le constat du grand débat national est édifiant pour les jeunes d’Orléans-La Source : ils ne se sont pas exprimés. Et donc, n’ont pas pu se faire entendre. Un cahier de doléances était pourtant posé en mairie de proximité.


Trente-huit de ses pages en étaient noircies d’encre. En les tournant, on comprenait bien vite la réalité. "TVA", "CSG", "ISF"… Difficile de croire que ces sigles fiscaux soient la priorité des moins de 24 ans du quartier. Aucun jeune ne s’était donc déplacé à la mairie de proximité pour lever son stylo et inscrire ses requêtes.


Selon des statistiques de l’Insee fournies par Hubert Bouquet (habitant du quartier et ancien chargé d’études à l’Observatoire régional de la formation et de l’emploi), ils étaient pourtant 54% à être âgés de moins de 29 ans en 2014 dans les trois zones les plus défavorisées de La Source : la dalle, les HLM nord et les HLM sud. Et rien n'indique que ces chiffres ne sont toujours pas d'actualité.



Ils n’étaient pas plus à s’être rendus à la salle Pellicer, le 13 février 2019, à l’occasion d’une réunion publique pour le grand débat. Le BBC s’en était déjà fait tristement l’écho.


"Je n’ai rien à dire"


Un an plus tard, pas plus de jeunes langues se délient lorsqu’on fait le tour du quartier. Sur la place Ernest-Renan, ce sont souvent les mêmes réponses. "On ne parle pas Monsieur !" ou bien "Je n’ai rien à dire". Sauf pour nous proposer un peu de cannabis. On décline poliment, ils n’insistent pas.


Sur la terrasse de la boulangerie, Mario et Luigi (les noms ont été modifiés) sont assis, discutent, regardent les gens passer. Bref, ils "galèrent". Qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente, les deux vingtenaires restent sur ce semblant de place du village.


Le duo n’élude pas les petits trafics qui s’effectuent sur le parking, mais explique qu’il n’y a pas d’insécurité sur cette zone. "Ici il y a des filles, des mamans qui passent. Il n’y a jamais rien." De loin, on pourrait penser que leur quotidien n’est pas si triste que cela. Mais pour eux, le quartier ressemble à une prison dont ils rêvent de s’évader. Morose quotidien.


Peu d’emploi, peu de perspectives… Un boulot pour combler la routine et le porte-monnaie ? "J’aimerais devenir militaire", pose tranquillement Luigi, avant d’éclater de rire. "Non, sérieusement, j’aimerais juste avoir un bon métier." Et là, le bas blesse, car les perspectives restent limitées dans le quartier.


"Je ne veux pas travailler pour 600 euros"


Selon Hubert Bouquet, le taux de chômage des jeunes approche les 50% dans des zones telles que les HLM nord et sud, ou la dalle selon ses données de 2014. Plus globalement, l'Insee établissait en 2017 un taux d'emploi à La Source dans la moyenne très basse des quartiers prioritaires de la métropole d'Orléans. Celui-ci dépassait péniblement les 54% pour les hommes et les 43,6% pour les femmes.



"La maison de la réussite propose des chantiers d’insertion. Mais je ne veux pas travailler pour 600 euros et sans formation à la clé", lance Mario. Se faire exploiter ou prendre un demi-emploi, très peu pour lui. Il faut dire qu'avec 65,7% de la population située en-dessous du seuil de pauvreté, des salaires bas sont loin d'être le rêve pour des jeunes cherchant d'autres perspectives.



"On fait un peu d’intérim. Mais il n’y a pas de travail dans le quartier", complète Luigi. "On va souvent jusqu’à Saran pour travailler. Il y a pourtant des usines à Saint-Cyr-en-Val, mais elles ne veulent pas nous prendre. T’as vu notre tête, notre dégaine ?"


Pourtant rien d’exceptionnel. Jeans ou pantalon de survêtement, baskets… L’attirail du jeune, ni plus, ni moins. Mais la confiance semble rompue depuis longtemps. Confiance dans les institutions, dans le monde qui les entoure, dans les associations, et même dans leur propre parole. Comme si tout ce qui sortait de leur bouche n’avait aucune valeur, aucune crédibilité.


Le manque d’estime de soi, puis l’absence de perspectives d’emploi. Ou plutôt l’inverse ? Difficile de savoir ce qui a tracé le début de ce cercle vicieux.


Retrouvez ci-dessous, l’émission enregistrée du Bondy Blog Centre Café avec trois jeunes issus du quartier


Thomas Derais (en collaboration avec Daniel Beghdad, du Bondy Blog Centre)


0 commentaire
bottom of page